La Maison de la Poésie

La Maison de la Poésie

Scène littéraire

Maison de la Poésie Paris

La Maison de la Poésie de Paris est une scène de lectures, de rencontres et de création dédiée à la voix des poètes et des écrivains. Elle s'adresse aussi bien à ceux qui ont toujours un livre en poche qu'à ceux qui découvriront le texte porté autrement, par la scène, la voix, la musique, l'image...

En cours de lecture

Maylis de Kerangal – « Rouge »

Lecture par l’autrice

À l’occasion d’un prix littéraire canadien qui lui a été attribué, Maylis de Kerangal a été invitée à composer un recueil de textes : c’est cet Archipel qui paraît aujourd’hui. Y sont rassemblés des fictions, des essais et des récits, des « îles » aux formes et histoires différentes, qui tiennent ensemble par une unité sous-jacente, un « même climat, un même idiome, une même origine géologique. » En ouverture, la novela « Rouge » serait l’île principale où s’ancre la langue, sa possibilité d’exploration et de suspension. La narratrice y déploie un souvenir, une expérience personnelle vécue à la fin des années 1980 d’un dimanche où elle a été embauchée comme hôtesse à l’hippodrome de Longchamp.

Différencier, spécifier, individualiser : il s’agit toujours d’en découdre avec les généralités, de rompre avec les stéréotypes qui débrident la haine, là où singulariser apporte l’affect qui la combat.
“Danseurs, plongeurs, descripteurs” – Un archipel, Maylis de Kerangal

À lire – Maylis de Kerangal, Un archipel. Fiction, récits, essais, Les Presses de l’Université de Montréal, 2023.

En cours de lecture

« Dans la splendeur d’une nuit haïtienne » avec Dany Laferrière

« J’ai toujours rêvé d’une biographie qui exclurait les dates et les lieux pour ne tenir compte que des émotions ou des sensations, mêmes fugaces. La première fois que j’ai vu une libellule. La fois que je suis entré dans la mer en ignorant qu’il fallait savoir nager. La fois que j’ai assisté à l’exécution d’un prisonnier politique près du cimetière de Port-au-Prince. Le dernier regard de ma mère me voyant partir en exil. Ma première promenade dans la cour de l’Académie. Et toutes les fois que j’ai regardé dans un ciel étoilé en espérant trouver la Niña Estrellita. »
Dany Laferrière

Dany Laferrière nous entraîne dans une merveilleuse lecture-conférence-projection avec sa poésie et ses poètes préférés. Une façon joyeuse de saluer un parcours exceptionnel d’écrivain (37 livres et de multiples distinctions depuis 1985) et de conjuguer un compagnonnage ainsi que nos anniversaires : il y a dix ans tout juste il ouvrait la programmation de la Maison de la Poésie devenue “scène littéraire”, il y a dix ans également, il entrait à l’Académie Française. Pardon pour les dates, place à l’émotion.

« Je marcherai
s’il le faut
toute la nuit
afin de me
rendre disponible
à l’imprévu. »
Dans la splendeur de la nuit, Dany Laferrière

À lire
– Dany Laferrière, Vers d’autres rives, éd. de l’Aube 2019
– Dans la splendeur de la nuit, Points, 2022
– Petit traité du racisme en Amérique, Grasset, 2023.

En cours de lecture

Violette d’Urso – Même le bruit de la nuit a changé

Lecture musicale par l’autrice & Adrian Edeline
Rencontre animée par Camille Thomine

« J’ai passé des années à être déçue par tout le monde parce que tout le monde n’était pas mon père. » Anna, l’héroïne du premier roman de Violette d’Urso, est encore une enfant quand son père meurt brutalement. Elle remplit son absence par quelques objets hétéroclites, par des histoires qu’on lui a racontées et par son puissant imaginaire. Jeune femme, elle comprend qu’elle ne sait pas quoi faire de cette « souffrance de déracinée ». Cette douleur se révèle à elle par le corps : sans le savoir, « j’avais commencé la destruction de ma vitalité à tout juste six ans. » À partir d’un répertoire qui lui a appartenu, elle arpente les villes d’Italie, d’où son père était originaire, et remonte pas à pas l’histoire de sa famille. C’est à la rencontre de cet homme qu’elle doit aller. Et c’est un véritable personnage de roman qui l’attend.

À lire – Violette d’Urso, Même le bruit de la nuit a changé, Flammarion, 2023.

En cours de lecture

L’Île Équinoxe, Anthologie poétique de Jean Fanchette

Lecture par Anna d'Annunzio
Entretien avec Philippe Rey & J.M.G. Le Clézio (en duplex des Etats-Unis)
Entretien animé par Julien Viteau

« La poésie de Jean Fanchette est exigeante, elle est authentique dans chacune de ses paroles, dans la richesse de son rythme, la valeur de ses mots. Il n’est pas indifférent que dans le monde moderne, imbu de théorie et assourdi de certitudes, ce soit cette voix très ancienne, qui charrie toute la complexité et l’originalité de la culture mauricienne, il n’est pas indifférent que ce soit cette voix-là qui nous donne foi dans la poésie. » J. M. G. Le Clézio

L’Île Équinoxe, anthologie poétique de Jean Fanchette, (Île Maurice 1932 – Paris 1992) poète, éditeur et neuro-psychanalyste rassemble, selon le plan laissé par avant sa mort, les différents recueils composant son œuvre poétique. Empreints de rigueur formelle, ces écrits disent la nostalgie de l’île d’origine, abandonnée très tôt pour la patrie d’exil : « Je ne suis pas d’ici. Je ne suis plus d’ailleurs. » Cet arrachement ne laisse plus au poète qu’une « identité provisoire ». L’Île Équinoxe est traversée par la voix vibrante d’un homme qui, grâce à l’aventure du poème, peut se réapproprier un monde perdu.

« Je suis debout dans la trouble lumière
Arrimé à de petites choses, une odeur, une couleur
L’odeur du vent traverse l’espace salé de la lagune qui habite en moi,
Qui bat dans mon sang vagabond d’hémisphères »
L’Ile Equinoxe : Poèmes 1954-1991, Jean Fanchette

À lire – Jean Fanchette, L’Île Equinoxe, (préface de J.M.G. Le Clézio, postface de Michel Deguy), réédition chez Philippe Rey, 2023.

En cours de lecture

Camille Laurens – Inventer le désir

Rencontre animée par Gisèle Sapiro

Camille Laurens est l’autrice de dix romans, parmi lesquels Dans ces bras-là (prix Femina 2000), Romance nerveuse et Celle que vous croyez, adapté au cinéma par Samy Nebbou. Elle a aussi écrit des récits, dont Philippe, des essais, notamment Les fiancées du diable, consacré aux femmes terrifiantes dans l’art, et La petite danseuse de 14 ans, autour de la célèbre sculpture de Degas. Elle est traduite en une trentaine de langues. Nous la recevons à l’occasion de la publication d’une partie de son œuvre en collection Quarto. Écrire, pour Camille Laurens, c’est enfreindre la loi du silence – et la recommandation familiale, celle de se taire. Écrire, c’est jouer avec la richesse des mots et les circonvolutions de la langue. Écrire, c’est sa réponse à un désir impérieux, celui de vivre et d’être en vie. Par les documents personnels et le choix d’entretiens rassemblés dans ce volume s’érige un pont entre vie et écriture, fiction et réalité, présence et absence, véritable fil d’Ariane tendu au lecteur, destiné à déambuler dans l’œuvre « labyrinthique » de Camille Laurens, depuis son premier roman Index (1991) jusqu’à Fille (2020).

« Il n’y a jamais eu pour moi de grande différence entre le désir d’aimer et le désir d’écrire. C’est le même élan vital, le même besoin d’éprouver la matérialité de la vie. Aimer, écrire : rester vivante. »
Inventer le désir, Camille Laurens

À lire – Camille Laurens, Inventer le désir, Gallimard (Quarto), 2023.