RÉGIS JAUFFRET – LE DERNIER BAIN DE GUSTAVE FLAUBERT
Rencontre animée par Marie-Madeleine Rigopoulos

« Conçu à la mi-mars 1821 d’un coup de reins que j’ai toujours eu quelque peine à imaginer, je suis né le mercredi 12 décembre à quatre heures du matin. Il neigeait sur Rouen, une légende familiale prétend que ma mère se montra si stoïque pendant le travail qu’on pouvait entendre tomber les flocons sur les toits de la ville. Quant à moi, je serais bien resté quelques années de plus dans le ventre à l’abri de l’imbécillité du monde.

Désespéré de naître j’ai poussé un atroce hurlement. Épuisé par mon premier cri, je semblais si peu gaillard qu’on attendit le lendemain pour me déclarer à l’état civil car si j’étais mort entre-temps on en aurait profité pour signaler mon décès par la même occasion. »

Le 8 mai 1880 au matin, Gustave Flaubert prit un bain. Il décéda peu après dans son cabinet de travail d’une attaque cérébrale sans doute précédée d’une de ces crises d’épilepsie dont il était coutumier. Allongé dans l’eau, il revoit son enfance, sa jeunesse, ses rêves de jeune homme, ses livres dont héroïnes et héros viennent le visiter. Il se souvient d’Élisa Schlésinger, la belle baigneuse de Trouville qui l’éblouit l’année de ses quinze ans, de Louise Colet dont les lettres qu’il lui adressa constituent à elles seules un chef-d’œuvre mais aussi de l’écrivain Alfred Le Poittevin qui fut l’amour de sa vie.

À lire – Régis Jauffret, Le dernier bain de Gustave Flaubert, Seuil, 2021.